
Editorial : Investir dans le savoir pour transformer des vies
Le savoir est un levier essentiel pour bâtir une transformation durable. Le succès des filets sociaux à Madagascar s’appuie sur une dynamique de transfert de compétences, de transmission de savoirs et de partage d’expériences qui permet de renforcer l’inclusion sociale et économique des plus vulnérables.
Les communautés bénéficiaires acquièrent des savoir-faire concrets pour améliorer leur quotidien et construire leur autonomie. Les partenaires de mise en œuvre ainsi que l’équipe du FID – Fonds d’Intervention pour le Développement bénéficient également de formations ciblées pour renforcer l’efficacité des interventions sur le terrain.
La récente visite d’échange des délégations de la République Démocratique du Congo (RDC) et de l’Union des Comores illustre l’importance des partages Sud-Sud.
A cette occasion, plusieurs séances d’échanges et visites de terrain ont été organisées, permettant aux participants d’apprécier les activités d’inclusion financière, via l’Association Villageoise d’Épargne et de Crédit, d’inclusion productive – agriculture, élevage, petits métiers – ainsi que de l’amélioration du bien-être familial, notamment du développement de la petite enfance. Une exposition mettant en valeur la contribution des filets sociaux dans la réduction de la pauvreté et de la croissance inclusive, ainsi que des produits des activités génératrices de revenus des ménages bénéficiaires a également été réalisée, en marge de cette visite.
Ces rencontres nourrissent la réflexion, favorisent l’innovation et renforcent l’efficacité des politiques sociales dans la région. Ensemble, en capitalisant sur les expériences de chacun, nous contribuons à bâtir des systèmes plus efficaces, plus humains, et surtout plus proches des besoins réels des communautés vulnérables.
Brèves

ZAFISOKE, membre du KOMIAZA ou Comité de protection de l’enfant à Betsimeda.
Zafisoke est une jeune mère d’un enfant. Auparavant, elle gagnait sa vie en vendant des beignets. En octobre 2024, avec 36 autres mères et jeunes filles, Zafisoke a suivi en formation sur la fabrication de savon dans le cadre des activités d’accompagnement du programme Fiavota. Après la formation, elle s’est lancée dans la fabrication de savon, même si au début, elle devait partager les ustensiles prêtés par les sœurs formatrices avec les autres participantes. Chaque semaine, elles se relayaient pour les utiliser. Déterminée à aller de l’avant, Zafisoke a commencé à acheter peu à peu ses propres ustensiles, en utilisant les moyens disponibles sur place.
Aujourd’hui, elle fabrique surtout du savon ménager qu’elle vend à 1 000 ariary la pièce. Elle propose également des savons cosmétiques, enrichis d’aloe vera et d’autres plantes locales, vendus à 2 000 ariary. « Je peux gagner jusqu’à 50 000 ar par jour les jours de marché. » confie-t-elle
Zafisoke ne cesse d’améliorer la qualité de ses produits. Elle multiplie ses équipements et adapte ses recettes en fonction de la demande des consommateurs.
« Grâce à la production régulière de savon, je peux répondre aux demandes de la communauté à Betsimeda. J’ai acquis de l’expérience et je suis prête à la partager avec d’autres bénéficiaires comme moi », affirme-t-elle fièrement.
Madagascar, la véritable force des programmes de protection sociale réside dans le renforcement de compétences et le transfert de connaissances, qui ouvrent la voie à l’autonomisation financière, à l’employabilité et à une plus grande résilience des familles bénéficiaires.
Les activités de formation permettent aux ménages bénéficiaires d’acquérir de nouveaux savoir-faire, qu’il s’agisse de pratiques pour le bien-être de la famille, de techniques agricoles améliorées, d’élevage, d’artisanat, ou de gestion financière. Dans le cas des programmes de protection sociale en milieu urbain, des formations spécifiques (pâtisserie, coiffure, coupe et couture, menuiserie, ouvrage métallique, mécanique automobile, fabrication de savon, etc.) offrent aux bénéficiaires l’opportunité de développer leur employabilité.
Concrètement, le transfert de compétences se réalise lors des espaces de bien-être, des espaces productifs ou des champs écoles, lieux privilégiés pour les pratiques agricoles. Il s’agit d’ateliers d’échanges et de pratique qui favorisent l’entraide, le partage d’expériences et la solidarité, renforçant ainsi le tissu social. La transmission des savoirs est assurée par des intervenants locaux issus des communautés bénéficiaires, préalablement formés par les techniciens.
Ces connaissances deviennent des outils précieux améliorant les capacités des bénéficiaires à briser le cycle de la pauvreté, en stimulant la dynamique entrepreneuriale et la création d’emplois grâce au développement d’activités génératrices de revenus.
Pour Sarave Ursula, bénéficiaire de Mijoro, un programme de filets sociaux urbains à Toamasina, le changement est tangible. « Avant, je vendais du charbon de bois. Grâce aux nombreuses formations dans le cadre du programme Mijoro, j’ai appris à élever des poules pondeuses, des poulets de chair, et des porcs. Avec les fonds que j’ai reçus dans le cadre du programme, j’ai lancé mon élevage de porcs, en acquérant un mâle et une femelle. La première portée comptait 12 porcelets que j’ai vendus auprès d’autres éleveurs. Après cela, le cycle recommence », raconte-t-elle avec fierté.
L’histoire d’Ursula n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Depuis 2016, 1 260 000 ménages malagasy vulnérables ont été accompagnés sur le chemin de l’autonomie financière et de l’inclusion économique. Parmi eux, 80 % ont lancé des activités génératrices de revenus. Au niveau local, la dynamique entrepreneuriale a également contribué à la création de 1,5 à 2 emplois indirects, renforçant les moyens de subsistance au sein des communautés.

ANDRIANIRINA Zata, bénéficiaire de Asa Avotra Mirindra, Commune Matanga, District Vangaindrano, Région Atsimo Atsinanana
“Avant, je m’endettais un peu partout pour pouvoir envoyer mes enfants à l’école et pour acheter de quoi manger à la maison. Parfois, quand on me prêtait une somme un peu plus importante, je l’utilisais comme fonds pour vendre du sel et du pétrol. Avec les petits bénéfices, je faisais de mon mieux pour gérer les dépenses de la maison.
Quand j’ai bénéficié du fonds de soutien, dans le cadre du programme Asa Avotra Mirindra, j’ai décidé de me lancer dans un petit commerce. Etant âgée, je n’ai plus trop la force pour cultiver. Alors j’ai choisi de vendre du charbon et du bois de chauffe.
J’ai commencé avec 14 sacs, et j’en vends deux par jour. Petit à petit, j’ai pu agrandir mon activité et améliorer la vie de ma famille.
Aujourd’hui, mes enfants vont bien à l’école. Deux d’entre eux passeront le bacc cette année. Je peux payer leurs frais de scolarité, et mêmes leurs fournitures et provisions pour les examens sont déjà prêtes. Asa Avotra Mirindra a vraiment sauvé ma vie. A present, je peux m’en sortir toute seule.”

1. Qu’est ce qui vous a motivé à devenir un Paysan Relais ?
J’ai été choisi par mon propre groupe communautaire, Fivoarantsoa. J’étais déjà cultivateur, mais je travaillais avec les anciennes méthodes de mes parents. Être désigné m’a donné confiance et l’envie de rendre à la communauté ce que j’avais reçu. Devenir Paysan Relais, c’est s’engager pour le bien commun et montrer qu’on peut évoluer ensemble. Grâce à ce rôle, je contribue à améliorer nos pratiques agricoles, plus efficaces, et plus respectueuses de l’environnement
2. Quelles compétences ou connaissances avez-vous acquises et comment les partagez-vous?
J’ai appris beaucoup grâce à Vatsin’Ankohonana : agriculture durable, techniques agroécologiques comme le basket compost et la culture sur butte. Avec les bénéficiaires de notre groupe, nous avons ensemble loué un terrain pour appliquer ce que nous avons appris, à animer les séances pratiques durant lesquelles chacun partage ses expériences. On progresse ensemble, et nos récoltes sont plus abondantes et durables. Aujourd’hui, je maîtrise bien les différentes méthodes, et je continue à m’améliorer.
3. Quelle est votre plus grande fierté en tant que Paysan Relais ?
C’est la confiance que les autres ont placée en moi. Ils viennent toujours me demander conseil, même maintenant que le programme touche à sa fin. Cela me montre que ce que je fais a du sens. Je transmets ce que j’ai appris, et j’apprends aussi des autres. Notre communauté devient plus autonome, les récoltes sont meilleures et les familles sont mieux nourries. Malgré que les appuis financiers du programme cessent, les connaissances que nous avons acquises restent, et ça, c’est ma plus grande victoire.
La Garderie communautaire : un espace sécurisé où les enfants peuvent s’épanouir pendant que leurs parents travaillent

Dans de nombreux ménages vulnérables, les mères sont contraintes d’emmener leurs enfants sur leurs lieux de petits boulots, faute des moyens pour les inscrire en crèche. C’est ainsi que dans le cadre des programmes de protection sociale, Vatsin’Ankohonana et Asa Avotra Mirindra, des garderies, placées sous l’organisation communautaire, ont été mises en place au niveau de quelques zones pilotes et devraient être étendues à l’ensemble des différentes communes d’intervention. L’objectif est de permettre aux parents de vaquer à leurs occupations tout en stimulant les tous petits à l’éveil et au développement.
« La garderie communautaire est l’aboutissement de la formation en développement de la petite enfance intensive que nous avons reçue au cours des Espaces de bien-être. Nous avons appris à prendre soin des enfants, en matière d’hygiène et de nutrition, à réaliser des activités d’éveil adaptées à leur âge et d’installer une routine stable favorisant leur développement cognitif et émotionnel. En communauté, nous avons décidé ensemble du fonctionnement et surtout de la motivation des personnes qui vont s’occuper des enfants. » a fait savoir SAFIDINJANAHARY Honorine, animatrice à la garderie communautaire du Fokontany Ankofika, Commune Urbaine d’Ambalavao. Pour RASOAHANTA Nadia Claudine, bénéficiaire du programme Vatsin’Ankohonana dans le Fokontany Ankofika, cette structure est bien plus qu’un endroit où déposer les enfants. « La garderie communautaire enrichit nos interactions en tissant un lien cordial entre les parents et en cultivant la notion de bien commun » témoigne-t-elle.
FfD4 - L’appel du FIDA : investir de manière judicieuse dans la croissance rurale et créer jusqu’à 4 500 milliards d’USD d’activité économique dans les systèmes agroalimentaires
Rome/Séville, 27 juin 2025 – Réunie à Séville pour la 4e Conférence internationale sur le financement du développement, la communauté mondiale discute de solutions face aux tensions géopolitiques et aux défis climatiques. Le FIDA appelle à réformer en urgence les financements en faveur des systèmes agroalimentaires, moteur potentiel de croissance rurale et de création de 120 millions d’emplois. Investir 0,5 % du PIB mondial pourrait générer 4.500 milliards USD par an d’ici 2030.
Le FIDA souligne l’impact des investissements dans les petits producteurs et les zones rurales, souvent négligées. Il plaide pour un système financier plus équitable et mobilise les capitaux privés, les banques de développement pour bâtir des économies rurales durables, inclusives et résilientes.
La Conférence de Séville est une occasion unique de réformer en profondeur la finance mondiale et de renouveler notre engagement en faveur du développement en tant qu’investissement stratégique pour la paix mondiale, la prospérité et la durabilité de notre planète, a estimé le Président du FIDA. « Nous devons réformer le système pour mieux utiliser ce dont nous disposons, de manière juste et transparente, en nous concentrant sur l’impact ».
Sources : https://www.ifad.org/fr/w/actualites/ffd4-l-appel-du-fida-investir-de-maniere-judicieuse-dans-la-croissance-rurale-et-creer-jusqu-a-4-500-milliards-d-usd-d-activite-economique-dans-les-systemes-agroalimentaires
