FID’actus Mai 2021

Bulletin d’information trimestriel du FIDN°08.Mai 2021 @FIDMadagascar

SOMMAIRE

Epargne communautaire
une solution pour l’inclusion économique

Histoire :
Nous pouvons réellement concrétiser nos projets

3 questions à
Achille RAZAKATOANINA
Directeur des Activités post-crises du FID

Histoire :
Il n’est plus question de retourner dans la rue

Une protection sociale adaptée aux chocs :
Soutenir les enfants et la population en situation d’insécurité alimentaire

« Avec mon mari, nous avons appliqué les techniques d’agriculture modernes prodiguées dans le cadre du programme Asa Avotra Mirindra. Grâce à ces techniques, nos récoltes ont nettement augmenté. » nous raconte Marie Claire, mère de famille de 54 ans dans l’Isandra, Fianarantsoa. « Nos dettes s’accumulaient, nous n’arrivions pas à mettre de l’argent de côté. Avec Asa Avotra Mirindra, nous avons été formés à mieux gérer nos ressources et avons commencé à faire des épargnes. Nous avons pu investir dans du bétail et diversifier nos sources de revenus. »
Les mesures d’accompagnement dit MACC complètent les programmes de transferts sociaux mis en oeuvre par le FID. Ils renforcent les compétences des bénéficiaires à s’engager dans des activités économiques rurales et offrent un espace pour le développement du capital humain en sensibilisant les familles à adopter des comportements positifs.

Vers l’inclusion économique
Au sein des « espaces productifs », les bénéficiaires sont formés sur des gestions financières simplifiées, les initiatives « coup de pouces » sont lancées pour les aider à fixer des objectifs d’épargne et des AVECs ou

Associations Villageoises d’Epargne et de Crédit sont créées pour offrir aux membres l’opportunité d’épargner et d’investir dans d’autres activités génératrices de revenus. Des renforcements de capacités sur les techniques innovantes leur sont également octroyés pour améliorer leur productivité dans l’agriculture et l’élevage. Les thématiques concernent : la culture sous couverture végétale, la demi-lune agricole, le Système de Riziculture Améliorée (SRA), la pisciculture, l’agroforesterie, la pépinière, le reboisement, les dispositifs antiérosifs, le compost, le basket compost, l’élevage ovin et caprin …

Développer le bien-être des familles
Des « espaces de bien-être » sont ouverts aux bénéficiaires à travers des espaces physiques aménagés pour accueillir les familles. Elles s’y échangent les bonnes pratiques sur les Pratiques Familiales Essentielles (PFE) et reçoivent des formations nécessaires à leur épanouissement : santé, hygiène, nutrition, éducation citoyenne, protection … Les enfants disposent d’un espace dédié avec des aires de jeux et des activités éducatives. Ceux de moins de 5 ans bénéficient d’un accompagnement à l’éveil et à

l’épanouissement dénommé « Développement de la petite enfance ». Outre l’éducation parentale, les parents jouissent également d’une alphabétisation.

Responsabiliser les bénéficiaires
Les bénéficiaires sont fortement impliqués dans la mise en oeuvre des MACC. Les mères-leaders, élues par leurs pairs et formées le long des programmes sensibilisent, accompagnent et motivent les ménages à adopter des comportements positifs grâce aux visites à domicile et les espaces de bien-être. Les agents villageois, nommés par la communauté de par leur dynamisme et leur implication, accompagnent la mise en place des AVECs.

Dans la mise en oeuvre de ses programmes, le FID vise un développement durable, profitable à la génération future. Dans cette optique, les mesures d’accompagnement intègrent également la préservation de l’environnement, la lutte contre les violences basées sur le genre, la lutte contre la propagation de la Covid-19, la sécurité des biens et des personnes… bref, le bien-être des communautés cheminant vers un développement durable.

Les mots du Directeur Général

La crise de la santé liée à la Covid-19 et les différentes mesures adoptées pour la contenir ont mis à rude épreuve nos systèmes socio-économiques révélant une population plus vulnérable et plus précaire. Les dispositifs de protection sociale prennent ainsi toute leur importance.

En accord avec sa mission, le FID multiplie ses efforts pour soutenir les familles les plus vulnérables vers une amélioration durable de leurs conditions de vie. Notre approche vise à responsabiliser les ménages bénéficiaires de leur progrès. Ils sont les premiers acteurs de leur développement, nous les accompagnons en les armant au mieux à travers les sensibilisations, les incitations et les formations pour l’adoption de nouveaux comportements.

Particulièrement en ce contexte, nos interventions pour appuyer les familles vulnérables affectées par les effets de la pandémie dans le cadre du projet « Fiatrehana ny voina sy Fanarenana » continuent. Les premiers paiements pour les différents programmes de ce projet ont tous été lancés à ce jour si les activités d’accompagnement sont en passe d’être opérationnalisées.

Par ailleurs, les activités menées dans le cadre des autres projets se poursuivent. Pour le financement à travers les ressources propres internes (RPI) du Gouvernement, les interventions sont lancées à l’instar du Tsatok’Angady de Asa Avotra Mirindra à Isandra ou les premiers transferts de Vatsin’Ankohonana à Brickaville.

Pour le projet Filets Sociaux de Sécurité (FSS), financé par la Banque Mondiale, malgré quelques décalages, les activités sont en bonne voie. D’autre part, son troisième fonds additionnel, d’une enveloppe de 150 millions USD, est actuellement en pleine préparation avec une mise en œuvre prévue vers la fin de cette année.

En matière de constructions, les réceptions provisoires de près de trente infrastructures scolaires réalisées sous la gestion des communautés locales ont été effectuées depuis février à ce jour.

Les défis sont prodigieux mais nous restons convaincus que les changements peuvent s’opérer… des changements impulsés par cette approche multidimensionnelle du développement et qui commencent avant tout au niveau des bénéficiaires.


Jaona ANDRIANANTENAINA
Directeur Général . FID

Epargne communautaire,
une solution pour l’inclusion économique

VOAMAMI (Vondrona Olona An-toerana miara- MAnao tahiry sy MIfampindram-bola) est le nom malagasy donné aux associations villageoises d’épargne et de crédit plus connues sous l’acronyme AVEC. Elles ont été mises en place pour aider les ménages bénéficiaires à accéder à un système financier et à renforcer leur capacité de résilience. On compte près de 600 AVECs établis par le FID dans ses zones d’intervention depuis 2018.

Une AVEC est un groupe de 15 à 25 personnes qui épargnent ensemble et font de petits emprunts à partir de ces épargnes. Les membres se réunissent une fois par semaine et mettent leur argent de côté dans une caisse commune en achetant des parts. Cet argent sert pour un achat ou un investissement mais fonctionne aussi comme une assurance ou une protection pour les moments difficiles.

Les activités des AVECs fonctionnent en « cycles » d’une durée d’environ un an. A la fin d’un cycle, les épargnes accumulées et les bénéfices tirés des prêts sont répartis entre les membres proportionnellement au montant qu’ils ont épargné. Toutes les transactions de l’AVEC sont réalisées devant les membres au cours des réunions afin d’assurer une plus grande transparence et maintenir la confiance entre les membres.

Grâce aux AVECs, les communautés sont de plus en plus autonomes et aptes à prendre soin de leur famille, leurs conditions de vie s’améliorent. Par ailleurs, les règlements observés au sein de ces groupements inculquent la notion de discipline et de respect de l’autre et contribuent à asseoir une meilleure cohésion des communautés.

Nous pouvons réellement concrétiser nos projets

Seylia Behara, Amboasary Sud

« Je n’avais même pas de meubles dans ma maison, pas de lits, pas de chaises. Je n’avais pas les moyens de me procurer de tels effets. Pour dormir c’était à même le sol, même pour mon fils de 6 ans », nous raconte Seylia dans la commune de Behara, à 15 km du district Amboasary dans le sud de Madagascar.

Bénéficiaire du programme Fiavota mis en œuvre par le FID dans cette région Anosy, elle a été élue Mère-leader de sa communauté. Epargnant depuis le début du programme, elle a pu concrétiser ses projets dont l’acquisition des mobiliers de maison.

« Grâce au programme Fiavota, nous recevons également des formations dans la gestion de nos ressources. En gérant mieux ses revenus, nous pouvons réellement concrétiser nos projets et améliorer notre niveau de vie » affirmet- elle.

En gérant mieux nos revenus, nous pouvons améliorer notre niveau de vie

3 Questions à Achille RAZAKATOANINA

Directeur des Activités post-crises du FID

FID’Actus : Les résultats de l’IPC (cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire), sortis ce mois de mai, montrent une nette détérioration de la situation nutritionnelle dans le Grand Sud. Cette situation nutritionnelle alarmante semble persister malgré des interventions en aide alimentaire et en cash dans différentes zones. Pourquoi ?

AR : La malnutrition tend en effet à s’aggraver dans cette partie du pays, principalement, à cause de la sècheresse. L’insuffisance de pluies réduit la production, tarit les points d’eaux et perturbe les moyens de subsistance. L’aspect démographique impacte aussi sur la situation. Le taux brut de natalité reste élevé avec 45,2 ‰ pour la région Androy. L’insécurité constitue aussi un facteur déterminant. Quasi permanente, elle affecte les activités des ménages ainsi que leur volonté et enthousiasme à réaliser des investissements. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le Sud dispose d’un potentiel agricole qui

n’est pas exploité du fait de la faiblesse de l’encadrement et des capacités techniques. Par ailleurs, les ménages ne disposent pas de ressources monétaires suffisantes pour acquérir des outillages, des matériels ou des semences. Ils ont même du mal à acheter la quantité d’aliments nécessaires.
Les appuis des secteurs de la nutrition et de la protection sociale ne suffisent pas. La conjugaison des interventions des différents secteurs comme l’agriculture, l’élevage, l’eau, la santé et l’hygiène, la sécurité, … est indispensable si l’on veut que les lignes bougent.

FID’Actus : Quelles stratégies le FID développe-t-il pour soutenir les ménages vulnérables affectés par cette situation et comment ces interventions sont-elles opérationnalisées ?

AR : Les interventions du FID adoptent la proximité 

comme approche. Le ménage est au cœur même de nos actions. Bien plus que l’appui en cash, les ménages bénéficiaires sont encouragés dans l’éducation de leurs enfants, la nutrition, la santé et l’hygiène… mais aussi dans l’épargne et l’investissement dans de petites activités rentables. Ces mesures d’accompagnement sont fournies aux ménages pour qu’ils puissent faire face aux situations difficiles. Un appui nutritionnel à travers l’approvisionnement et la distribution de plumpy sup en collaboration avec les ORN est aussi apporté à ces bénéficiaires.

Par ailleurs, des extensions de couverture, sous le mécanisme de protection sociale réactive aux chocs, sont opérées lorsque la situation le requiert. Une extension verticale c’est-à-dire une augmentation du montant des transferts pour les ménages déjà bénéficiaires du Fiavota ou une extension horizontale, enrôlement de nouveaux bénéficiaires, est ainsi réalisée.

Il s’agit du Toseke Vonjy Aigne. Le montant des transferts est alors fixé à 80.000 Ariary.

FID’Actus : La sècheresse est un phénomène récurrent dans le Sud du pays. Quelles actions recommandez-vous pour atténuer et faire face à ses effets ?

AR : Le projet de forage et de pipeline initié actuellement est vraiment une très bonne chose. Malgré tout, il doit être accompagné par différentes actions multisectorielles comme l’accès aux techniques agricoles et la dotation en semences ; l’accompagnement technique des activités d’élevage ; l’instauration d’une sécurité durable ; la formation aux divers métiers et l’accès au marché. Le désenclavement de cette partie du pays est également crucial.
Enfin, le plus important serait d’inculquer à la population une culture et une volonté de réel changement.

Une protection sociale adaptée aux chocs pour soutenir les enfants et la population en situation d’insécurité alimentaire et d’urgence nutritionnelle

Face à l’urgence nutritionnelle et à l’insécurité alimentaire à laquelle est confrontée la population du sud de Madagascar, UNICEF répond par une expansion du programme national de protection sociale.
Avec le financement du Foreign, Commonwealth and Development Office (FCDO), 3 580 ménages (environ 11 000 enfants) ont reçu des transferts d’urgence mensuels de 80 000 MGA de décembre 2020 à avril 2021, dans la commune de Ifotaka à travers le Toseke Vonje Aigne .

Cette commune était déjà une zone d’intervention du programme national de protection sociale (connu comme Fiavota) appuyée par UNICEF depuis 2016. En réponse à la crise, le programme a été étendu en termes de couverture et de taille du transfert. Des ressources supplémentaires sont en train d’être mobilisés pour poursuivre et étendre la couverture dans les mois à venir.
La réponse est coordonnée par le groupe de travail national sur les transferts d’urgence (Cash Working Group), et l’assistance est fournie par UNICEF et la Banque mondiale (à travers le FID), PAM, PNUD, SAF-FJKM, CRS et CRM.

Source: UNICEF

Il n’est plus question de retourner dans la rue

Zanasoa Raharisolofo est une des bénéficiaires du programme « Ankohonana Miarina », le programme de transfert monétaire du Gouvernement malagasy pour venir en aide aux familles les plus vulnérables à la suite de la pandémie de la COVID-19. Elle fait partie des sans-abris accueillis par le Centre Iarivo Mivoy Anosizato en raison des mesures de confinements opérées dans la capitale.

« Pendant près de 3 mois, j’ai erré dans les ruelles d’Antanimena avec mon fils de 17 ans. Nous étions obligés de mendier pour pouvoir nous nourrir et la nuit, nous étions en proie à l’insécurité grandissante. » nous raconte-t-elle.

« Depuis nous avons été accueillis au Centre. J’ai été sollicitée pour faire la cuisine pour notre petite communauté. J’ai des occupations qui me permettent de m’épanouir et avec les épargnes que je ferai grâce au programme « Ankohonana Miarina », je prévois d’ouvrir une petite épicerie afin d’être autonome et élever mon fils convenablement. Il n’est plus question de retourner dans la rue. » conclut-elle avec détermination.

Zanasoa Raharisolofo Ankany Iarivo Mivoy, Antananarivo

je prévois d’ouvrir une petite épicerie afin d’être autonome et élever mon fils convenablement. Il n’est plus question de retourner dans la rue

Brèves

Ankohonana Miatrika : Extension vers de nouvelles zones

Plus de 12 000 nouveaux ménages s’ajoutent aux bénéficiaires du projet de relèvement du Gouvernement malagasy « Fiatrehana ny voina sy fanarenana » afin de faire face à la pandémie de la Covid-19. Résidant dans les districts de Mahajanga et Nosy Be, ces ménages bénéficieront d’un transfert monétaire non conditionnel d’une valeur de 50 000Ar par mois pendant 5 mois dans le cadre du programme « Ankohonana Miatrika ». Les répercussions socio-économiques des actuelles mesures sanitaires ont fortement affecté ces districts, notamment la fermeture des frontières paralysant une économie majoritairement touristique. L’extension du programme  assurera le relèvement de plus de 12 000 foyers qui seront également accompagnés dans le planning familial, le développement de la petite enfance et les pratiques familiales essentielles à leur bien-être.

Filets Sociaux de Sécurité : le fonds additionnel 3 en préparation

Mis en oeuvre depuis 2014, le Projet Filets Sociaux de Sécurité vient de bénéficier d’un troisième financement accordé par le Conseil d’Administration de la Banque Mondiale le 19 février 2021 . Ce fonds additionnel, sous forme de don, à hauteur de 150 millions de USD, servira à soutenir plus de 206.000 ménages vulnérables dans 14 régions et 29 districts du pays jusqu’en 2023. L’accord de financement entre l’Etat malagasy et cette institution financière internationale a été signé au mois de mars dernier. L’implémentation des programmes sont actuellement en pleine préparation : priorisation et validation des communes d’intervention, planifications stratégiques de l’ensemble du processus, préparation pour les recrutements : priorisation et validation des communes d’intervention, planifications stratégiques de l’ensemble du processus, préparation pour les recrutements …
Les premiers transferts dans le cadre des Transferts Monétaires pour le Développement Humain (Vatsin’Ankohonana et Fiavota) sont prévus pour le mois d’octobre de cette année 2021. Quant aux Filets Sociaux Productifs (Asa Avotra Mirindra), les premiers travaux devront débuter au mois de février de l’année 2022.

Projet d’appui à l’éducation de base (PAEB)

Le 15 mars dernier, l’EPP de Serana Vohibato inauguré par le Ministre de l’Education Nationale a officialisé la réalisation de plusieurs infrastructures scolaires. Aujourd’hui, 27 sites parmi les 100 prévus pour la première vague sont déjà opérationnels et une vingtaine sont en cours de réception technique pour ce mois de mai 2021. Notons que la construction des infrastructures scolaires, les transferts de compétences, la gestion de projet et le renforcement de capacités sont les principaux objectifs de ce projet. La communauté bénéficiaire est responsabilisée pour la construction de leur école. Le FID est missionné comme agence d’accompagnement de PAEB, un projet du gouvernement malagasy sous la coordination du Ministère de l’enseignement nationale et financé par la Banque mondiale.

Vu ailleurs

L’Afrique peut financer son développement mais a besoin d’un changement de paradigme

L’Afrique est confrontée à sa pire récession économique depuis 25 ans, en grande partie à cause de la pandémie Covid-19. On estime que l’économie du continent va se contracter de 2,6 % dans le pire des cas, poussant environ 29 millions de personnes dans l’extrême pauvreté et entraînant 19 millions de pertes d’emplois, tandis que les envois de fonds vers l’Afrique subsaharienne devraient diminuer de 23,1 % (37 milliards de dollars) rien qu’en 2020.

Le défi de l’Afrique n’est pas l’absence de liquidités ou de fonds pour financer le développement. Ses problèmes sont des flux financiers illicites massifs qui drainent les capacités de financement et le manque d’appropriation des ressources naturelles, associés à tout un discours construit autour de la gestion de la pauvreté plutôt que du développement, et décrivant l’Afrique comme un continent pauvre ayant besoin de l’aide de la communauté internationale.